Friday, March 11, 2011

La lutte contre la pauvreté ne peut se suffire de palliatifs



Interview Al Bayane:

Al Bayane - le premier ministre Abbas El Fassi a affirmé que le gouvernement a réalisé des avancées importantes dans le domaine social à savoir : l'enseignement, la santé et l'habitat et surtout la lutte contre la pauvreté dans notre pays. Comment voyez-vous les réalisations du gouvernement dans ces secteurs ?

Y.Belal : La lutte contre la pauvreté ne peut se suffire de palliatifs. Le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté reste la création d'emplois et la redistribution des richesses grâce à une croissance forte et durable. Or le taux de croissance que nous avons connu n'est pas durable et reste encore tributaire de la pluviométrie et de l'agriculture. Par ailleurs, l'absence de services publics dans les zones rurales pauvres et enclavées maintient de larges couches de la population marocaine dans la pauvreté. L'Etat doit investir massivement en infrastructures et en services publics dans les contrées les plus déshéritées.

Al Bayane- Le premier ministre a déclaré que le gouvernement a réussi à réaliser une amélioration du pouvoir d’achat et des revenus des citoyens. Par contre, beaucoup de Marocains affirment que les plans sociaux élaborés par l'Etat, ne contribuent qu’à élargir encore plus le fossé entre pauvres et riches. Ne pensez-vous pas que les riches sont devenus de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres ?

Y.Belal: De nombreux projets d'investissement servent des intérêts rentiers qui ont été à l'origine de la bulle spéculative dans le secteur de l'immobilier. Ces projets font l'objet d'une sur communication politique et ne sont pas suffisamment articulés à la création d'emplois et à la lutte contre la pauvreté. Ces projets ne sont pas orientés vers les régions pauvres et enclavées du monde rural. En outre, il n'existe pas de véritable politique de redistribution des richesses en faveur des plus pauvres. Ce qui aggrave encore plus les inégalités sociales

Al Bayane- L'habitat insalubre constitue une des priorités du gouvernement. Ce grand chantier est inspiré de la volonté du Roi Mohammed VI. Comment le gouvernement pourra-t-il, selon vous, éradiquer définitivement le fléau des bidonvilles ?

Y.Belal: La lutte contre les bidonvilles n'est pas une fin en soi et renvoie en réalité au problème de l'exode rural et de la ségrégation socio-spatiale. Reloger une famille de 8 personnes dans un appartement de deux pièces de 50 m2 dans des quartiers sans âme, sans espace vert, sans aire de jeux ni terrain de sport, sans maisons de jeunesse, sans bibliothèque, en un mot sans espace d'épanouissement culturel et social, ne résout pas le problème de la ségrégation socio-spatiale et de l'exclusion.

Al Bayane- Le taux de chômage a grimpé à 10 % dernièrement. Comment le gouvernement pourra t-il faire face à ce problème qui bloque tout développement de la société marocaine dans tous les domaines?

Y.Belal: Le marché du travail doit être en mesure de créer suffisamment d'emplois pour les nouveaux arrivants (jeunes diplômés, jeunes déscolarisés) et les chômeurs de longue durée. Une croissance élevée et durable est une condition nécessaire pour la création d'emplois. Il faut asseoir des réformes structurelles à vocation transformationnelle en engageant par exemple une véritable politique industrielle qui ne se contente pas d'une économie de sous-traitance et des centres d'appel.

Écrit par Entretien réalisé par : Mohcine Lourhzal 

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